Histoire

La plaine du Laonnois est un lieu de peuplement ancien.

Une tombe néolithique a été mise à jour en ammont de la Fontaine Sambrécourt, au sud du terroir de Chantrud, et des silex taillés ont été trouvés dans les champs.

Les peuplements gaulois ont laissé peu de traces.

Lors de la colonisation romaine, de nombreuses "villae" furent installées de part et d'autres des voies de communication, dont la route Laon-Hirson (actuelle R.N. 2) qui passe à moins de 2 km du Chantrud actuel. La découverte de tuiles bordées dans les champs confirme ces implantations romaines.

Mais les premières traces écrites de Chantrud (du latin "cantruvis" signifiant "chant du ruisseau") datent du XIIe siècle :

Au cours des guerres que se livraient Thomas de Marle (le redoutable sire de Coucy, de retour de croisade) et Roger de Pierrepont, Seigneur des lieux, Raoul, prévôt de l'abbaye Saint Martin de Tournai (actuellement en Belgique) voyant les terres en ruines obtint de fonder une prévôté au lieu-dit "Cantruvis" et d'en assurer la mise en valeur agricole.

C'est vers 1115 que l'abbaye Saint-Martin de Tournai prit en charge l'administration de Chantrud qui devint leur possession-titre sur le Laonnois et ce jusqu'à la révolution française, malgré des péripéties.

Les moines ne restèrent pas dans les lieux en raison de l'insécurité de la région, régulièrement parcourue par des guerres. Ils donnent les terres à bail et s'installent dans une "maison refuge" à Laon d'où ils peuvent administrer leurs possessions dans le Laonnois dont Chantrud est l'établissement principal. Cette maison située rue Vinchon existe toujours et porte le nom de "maison de Chantrud".

En 1787, les moines modernisent l'exploitation en installant les 2 fermiers dans des bâtiments rénovés.

Lors de la vente des biens du clergé, ces 2 fermiers se porteront acquéreurs à part égale avec un investisseur.

La base de l'exploitation pour le XIXe siècle est lancée.

En 1911, nos aïeux, M. et Mme Boquet, s'installent à Chantrud en provenance de Rogny au nord de Marle.

Pour marquer leur arrivée, ils restaurent le calvaire, qui était en ruine, face à la ferme. Ce qui donnera lieu à une grande cérémonie le 15 août 1912 lors de sa Bénédiction.

Ce calvaire, toujours debout actuellement, sera criblé de mitraille quelques années plus tard ...

Domaine de CHANTRUD, près GRANDLUP (Aisne)          Défilé de la Procession pour la Bénédiction du Calvaire           (15 Août 1912)
En 1914, les armées allemandes traversent la Belgique. Les soldats français, qui ont bousculé les armées impériales à la bataille de Guise, refluent. Les troupes allemandes arrêtées lors de la bataille de la Marne établissent un front au sud de Laon et occupent le Nord, vivant sur le compte des habitants.

Une ligne de repli est installée entre Laon et Marle (Hundingstellung). Elle traverse les terres de Chantrud. Des prisonniers russes sont utilisés pour les travaux de construction des "blockhaus".

Lorsque les armées allemandes vont reculer à l'automne 1918, elles tiendront tête à l'artillerie française pendant 5 jours sur cette ligne (du 14 au 19 octobre), avant de se replier sur la Souche.

Le 3 novembre, une unité américaine au repos dans une grange de la ferme est atteinte par un obus ce qui tuera 35 soldats et en blessera 41.

Le pays est vidé de ses habitants. La ferme est détruite aux 2/3. On dénombre 13 trous d'obus par hectare. Nos aïeux Jeanne et Charles Boquet sont déjà âgés. C'est leur gendre, Lucien Vuilliot, de retour du front, marié à Charlotte Boquet en 1919, qui prendra en main la reconstruction de la ferme.

L'agriculture reprendra ses droits, se modernisera, mais de nouveaux bruits de bottes arrivent.

En 1939, c'est l'exode en direction de la Mayenne pour éviter l'occupation allemande qui a tant fait souffrir 25 ans auparavant.

Mais rapidement les Allemands envahissent tout le pays, alors il vaut mieux rentrer à la ferme. Elle n'a pas été détruite et l'occupation allemande est moins dure. Mais à cause de la présence d'un camp d'aviation en forêt de Samoussy, il faut encore se méfier des bombardements alliés et des obus de DCA.

La libération est proche. Mais c'est une époque de tous les dangers. Connu pour ravitailler le maquis d'Hirson et cacher des STO, Lucien Vuilliot est dénoncé. Le 1e juillet 1944, la ferme est encerclée par l'armée allemande et perquisitionnée. Mais en l'absence de preuves flagrantes, personne n'est arrêté.

Le mois suivant, les troupes alliées libèrent la région. La vie va pouvoir reprendre normalement. Cette fois-ci, il n'y aura pas à reconstruire, mais à moderniser. Ce sera l'œuvre du fils, Charles Vuilliot. Sorti de l'institut agricole de Beauvais en 1944 et revenu de 6 mois de stage aux Etats-Unis en 1946, il épouse Elisabeth Abelé en 1949 et reprend la ferme.

La mécanisation de l'agriculture entamée avant la guerre va éliminer le cheval, compagnon historique du paysan français et réduire la main-d’œuvre agricole. L'utilisation de la chimie agricole va amplifier le phénomène.

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Moisson à Chantrud en 1974,
la moissonneuse n'avait pas encore de cabine.

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En 1974, récolte, déjà mécanisée,
de la paille, mais en petits ballots.

En 1987, Charles Vuilliot prend sa retraite et passe la main à deux de ses fils : Christian et Yves pour faire face à de nouveaux défis de l'agriculture. Nous ne sommes alors plus dans l'histoire, mais dans le temps présent.